Ici et ailleurs, c'est possible
Hier, en fin d'après-midi, sur le port de Brest, il n'était question que du nouveau record de traversée de l'Atlantique par Francis Joyon, et du retour de la régate des Quatre Vents, aussi festive que sportive. À ce moment, ceux qui passaient par là se dirigeaient plutôt vers le Fourneau, le centre névralgique des arts de la rue. Là se terminait le festival des carnets de voyage, joliment dénommé "Ici et ailleurs". Organisé par l'association Enki, très activement présidé par Agnès Bellec que je connais bien par ailleurs comme bibliothécaire, il a attiré plusieurs milliers de visiteurs en trois jours.
"Ici et ailleurs" est un dédale sympathique de ruelles et de petits stands où peuvent se rencontrer ceux qui ont voyagé et ceux qui rêvent de le faire. Des sièges, des bancs, de petites tables sont installés ici et là pour inviter à la lecture ou à l'échange. Tout est attirant. On voudrait repartir avec des aquarelles et des dessins, des objets et des livres objets, des collages, de gros livres et des tout-petits, des cartes originales, des photos, des DVD, des cartes sonores…
Rien qu'en y passant deux heures, on aimerait apprivoiser l'Amérique du sud ou l'Asie centrale, des contrées dont celui qui y a été peut forcément vous parler. Il ne s'agit pas que de tourisme : on y présente aussi l'actualité incertaine de populations ou de peuples nomades, comme les Roms. Le festival, bisannuel, est un condensé du monde à portée de main, très accessible puisque le monde y vient à votre rencontre, forcément frustrant puisque vous devez, vous, vous contenter d'une promesse de voyage. Il est très bien que cela se passe dans un port et que ce soit à Brest.
La poésie du cybercafé
Ici et ailleurs, j'ai forcément rencontré des connaissances. Le peintre et voyageur Jean-Yves André présentait ainsi, outre son nouveau carnet de croix - consacré, si je puis dire, à celles du pays pagan - et ses dessins de minarets, cinq nouveaux mini-livres en accordéon sous un agréable coffret cartonné, en tirage limité : "Étranges estrans". Il s'agit de poèmes de Philippe Cousin, qu'il a illustrés.
Je me suis entretenu avec Julien Weber, qui se présente comme un autodidacte passionné, vidéaste, graphiste, designer, photographe… Il s'intéresse en ce moment à des archives familiales de films tournés à Ouessant dans les années 1950. Il m'apprend aussi qu'il est en train de concevoir le nouveau site web de la chanteuse Annie Ebrel.
Je me suis laissé tenter par un titre de Violette Gentilleau : "La poésie du cyber café". Tout simplement parce que j'ai moi-même été confronté à la nécessité de localiser ce type d'établissement, en Chine ou tout simplement dans les Alpes de Haute-Provence. Ce n'est pas bien épais, puisque "l'ouvrage" fait huit pages, couverture et illustrations comprises. Mais il est précisé qu'il a été "fabriqué à la main et à la maison avec amour, une agrafeuse murale, un massicot tordu, un scalpel et quelques litres de thé." On croit bien volontiers l'auteure. Elle, c'est au Laos qu'elle voulait dénicher un cybercafé. C'est assez drôle, bien observé et, même s'il y reste quelques petites coquilles, c'est surtout très bien écrit. Ça se lit donc très volontiers.
J'ai enfin pu bavarder avec le céramiste Glaoda Jaouen, bien connu dans presque tout le Finistère et au-delà. Le chanteur Manu Lann Huel m'a appris qu'il est au programme des Francofolies de La Rochelle : 20 ans après sa mort, jour pour jour, il y interprétera les chansons de Léo Ferré le 14 juillet prochain en compagnie de Didier Squiban et d'Alain Trévarin.
Prochain festival des carnets de voyage à Brest : dans deux ans seulement.