Conseil général du Finistère : vers un schéma linguistique départemental
La session de janvier du Conseil général du Finistère s’est ouverte dans une ambiance un peu spéciale. C'était la dernière avant les élections départementales (nouvelle formule) de mars prochain, et assez nombreux devraient être ceux qui ne feront plus partie de la nouvelle assemblée. À noter que Kofi Yamgnane, ancien conseiller général du Finistère, est spécialement revenu du Togo pour assister à cette session.
C'est sûr, Pierre Maille ne sera plus président à compter de la fin mars, puisqu’il a choisi de quitter la vie politique. Il a donc prononcé jeudi matin son dernier discours d’ouverture de session. Il l’a fait, a-t-il déclaré, avec la même émotion, la même fierté et la même humilité qu’il y a dix-sept ans, quand il s’était trouvé à la même place pour la première fois. Tous les élus, de droite comme de gauche, se sont levés pour l’ovationner.
Je ne l’ai pas entendu dire hier matin, mais Pierre Maille a toujours été l’homme d’un seul mandat : quand il a été maire de Brest, il a été maire, rien que maire ; tant qu’il a été président du Conseil général, il n’a été que président, jamais de cumul. C’est peut-être, mine de rien, ce qui a contribué à sa crédibilité et à sa notoriété. C’est aussi ce qui lui a donné la possibilité, soulignée par plusieurs de ceux qui se sont ensuite exprimés, de dépasser la logique de canton qui prévalait jusque là au sein de la collectivité à une logique de territoire, avec une vraie vision départementale.
Dans la conjoncture stressante du moment, P. Maille a clos son intervention sur une note d’espérance : il a confiance, a-t-il déclaré, en la capacité des Finistériens à créer du collectif et à surmonter leurs divergences. Sa première vice-présidente, Chantal Guillou-Simon, a témoigné pour sa part d’un autre aspect de la méthode Pierre Maille : il a instauré plus que la parité femmes/hommes au sein de l’exécutif du département, et ce n’est pas pour y faire de la figuration. On la croit volontiers quand elle fait état des dizaines de réunions qu’elle a eu à piloter pour l’élaboration des nouveaux contrats de territoire.
Clin d’œil ou pas, elle a conclu son intervention par un "Mersi braz, Aotrou Maille", dont Le Télégramme a fait sa une ce matin en page Bretagne. Quand on connaît la parcimonie avec laquelle on utilisait ce terme de "Aotrou" en breton – il n'y a pas encore si longtemps, il était réservé à… Dieu, à Monsieur le recteur, au châtelain, à Monsieur le maire – c'est plus qu'une marque de considération.
Unanimité moins deux abstentions
Ctte session avait surtout pour objet d'adopter le budget 2015 du Conseil général du Finistère. Mais parmi les nombreux dossiers à l'ordre du jour, il était également prévu de délibérer sur la politique départementale en faveur de la langue bretonne.
Le projet de délibération était présenté par Mme Blondin. Il s'appuie largement sur l'évaluation de la politique de promotion du breton qui vient d'être menée en 2014 – ce qui veut dire que ce travail d'évaluation n'aura pas été inutile. Il reprend en particulier l'idée d'un schéma départemental en faveur de la langue bretonne. Mais alors que le rapport du Comité d'évaluation préconisait l'adoption d'un schéma triennal, ce dernier s'étalera sur toute la période 2015-2020, pour être en cohérence avec les autres schémas départementaux.
Mme Blondin a fait état d'une prochaine rencontre dans le cadre du Pacte d'avenir pour la Bretagne entre les Conseils généraux, la Région, le Rectorat et la DRAC pour arrêter les modalités d'intervention des différentes parties prenantes en matière de langue bretonne.
Bonne nouvelle : la délibération a été adoptée à l'unanimité, moins l'abstention de deux élus pourtant connus comme des partisans convaincus d'une politique linguistique en faveur du breton : celle de Jean-Yves Cozan, conseiller général d'Ouessant, et celle de Christian Troadec, conseiller général de Carhaix.
Lors d'une longue explication post-vote, ce dernier a cependant souligné que "tout ce qui est fait ne peut être que bon." Mais il a exprimé bien des revendications : le recensement des bretonnants, un plan de sauvetage de la langue bretonne, la réunification de la Bretagne, une grande télévision régionale diffusant "des milliers d'heures" en breton sur les cinq départements…