La prononciation du breton : question taboue
Le nouveau livre de Mikael Madeg aborde un sujet sensible : celui de la prononciation du breton par les nouveaux locuteurs. Il y en a, parmi ceux qui ont appris le breton comme langue seconde, qui s'en sortent très bien. Mais on entend souvent dire que les néo-bretonnants ne peuvent pas échanger facilement avec les locuteurs traditionnels, ceux dont le breton est la langue première. Pourquoi ?
Le diagnostic de Mikael Madeg est celui-ci : le point faible de celui qu’on enseigne actuellement et qu’on pratique dans les médias est, dit-il, sa prononciation. Trop souvent elle est calquée sur celle du français, par laxisme ou par ignorance. Or, tant qu’à parler breton, autant que celui-ci ne soit pas en rupture radicale d’avec la langue ancestrale, authentique. Sinon, à quoi bon se battre pour une “langue“ qui, à l’oreille, sonne comme du français, si on n’y prend pas garde ?
Son livre a donc l'allure d'un pamphlet : il estime tout simplement que la prononciation est la priorité oubliée dans le combat pour la survie de la langue bretonne. Voilà qui devrait en énerver quelques-uns, d'autant plus que les exemples sont donnés dans l’orthographe “peurunvan“, la plus utilisée dans l’enseignement et qui est, selon l'auteur, la cause de tant d’erreurs de prononciation.
Mais c'est aussi un manuel ou un précis : Miklael Madeg explique de manière très didactique et très lisible les règles à suivre et comment les appliquer. L’ambition du son livre est de rapprocher les néo-bretonnants (pour lesquels le breton n’est pas la langue première) des bretonnants de naissance. C'est donc un livre pratique et bien utile.
Ce "Traité de prononciation du breton" concerne donc en premier lieu tous ceux qui, professionnels de la langue bretonne ou amateurs, ont le souci que le breton ne se coupe pas de ses racines authentiques. Il s’adresse aux enseignants de la langue, en priorité à ceux du premier degré et de maternelle, mais aussi aux autres ainsi qu’aux formateurs pour adultes. Si leur propre prononciation est déficiente, francisée, celle de leurs élèves peut difficilement être correcte.
Il se destine aussi aux professionnels des médias (radio, télévision…). Leur devoir est d’être exemplaires à cet égard puisqu’eux seuls, dans la plupart des cas désormais, peuvent créer un semblant de “bain linguistique“ hors cadre scolaire. Il s’adresse enfin aux artistes (chanteurs, acteurs…) qui utilisent le breton dans leur répertoire. Et il intéressera plus généralement tous les bretonnants soucieux de l'avenir de leur langue. La prononciation étudiée et présentée ici est commune à tous les dialectes bretons du Nord-Ouest, à savoir le Léon, le Trégor et les deux tiers de la Cornouaille.
Avec ce livre, Mikael Madeg aborde une question un peu taboue. Mais il ouvre un débat nécessaire. Un correspondant vient de m'écrire : "je me suis tout de suite procuré son livre : je suis tout à fait d'accord avec lui."
Rendez-vous à noter : Mikael Madeg est l'invité du café livres d'Emgleo Breiz, demain jeudi 27 mai, à 18 heures, au pub "Dubliners" à Brest.
Mikael Madeg. Traité de prononciation du breton du Nord Ouest. Brest, Emgleo Breiz, 2010, 145 p.
Contact éditeur.
Sur le même sujet, voir sur ce blog : "La thèse de Jean-Claude Le Ruyet" (message du 28 décembre 2009).