A Brest, Jean-Luc Melenchon parle des langues régionales
"An dud da genta" : voilà comment un flyer du Front de Gauche appelant à une assemblée citoyenne à Châteaulin pour le 8 décembre prochain restitue en breton le slogan "L'humain d'abord." Jean-Luc Mélenchon (photo DR), candidat à l'élection présidentielle, était hier à Brest, avant de se rendre ce soir à Lorient. A Brest, il a notamment rencontré les ouvriers de la réparation navale, qui réclament le maintien du chantier de la Sobrena au port de commerce, avant de prendre longuement la parole au cours d'un meeting qui a réuni 300 personnes à la salle des syndicats. L'orateur, multipliant les anecdotes, citant des chiffres, mais pas trop, fréquemment applaudi, s'est exprimé sans notes : dans cette salle, il aurait presque pu se passer du micro dont il s'éloignait constamment.
"La saison des tempêtes est revenue", a déclaré le candidat à propos de la crise de la dette souveraine. Il a commenté le sort de la Grèce et les positions d'Angela Merkel. Il a fustigé "le baragouin" des agences de notation avec un petit clin d'œil, feignant de se demander si c'était "un mot d'ici". L'alternative selon lui n'est que de céder ou de résister. Mais à ses yeux, pas de doute : il faut ré-indus-tria-liser. Faisant allusion à plusieurs reprises aux mots qu'il distille lors de ses interventions, il a expliqué son style et sa méthode : "l'humour, dit-il, est dévastateur". Et cet humour, il veut l'exercer à l'encontre de la droite, mais aussi contre ses concurrents à gauche. Le propos peut être sévère aussi : à la lecture de l'interview publiée hier par Le Télégramme, je me suis demandé ce qui pourrait bien se passer à gauche au second tour. Mais ceci est une histoire à venir.
Le breton dans la campagne électorale
André Le Gac, ancien maire de Plougastel-Daoulas et ancien conseiller général, a interpellé le candidat du Front de gauche hier soir sur la question des langues régionales, l'invitant à s'expliquer sur "une connerie" et à "retirer" les propos qu'on lui attribue, selon lesquels "Diwan est une secte."
Jean-Luc Mélenchon a repris la parole à la fin de son intervention et il a explicité son point de vue sur les langues en général et sur les langues régionales en particulier :
- "Je n'ai rien contre les langues régionales, qui doivent être enseignées dans l'enseignement public. Il va de soi que ces langues doivent être parlées, enseignées, transmises."
- "Dans notre pays, les gens viennent de partout et de nulle part. Il est normal que vous teniez à vos traditions et à vos langues. Mais il faut que vous vous tourniez vers le futur."
- "Nous avons le français en commun. Je sais le rôle qu'ont joué les femmes en Bretagne pour que leurs enfants en viennent à parler le français. Le français est pour tous le moyen d'échanger ensemble, la langue de la liberté."
- "Ce que j'ai pu dire de Diwan, c'était lors d'un apparté sur un autre sujet et c'est un horrible malentendu. Diwan n'est pas une secte. Les sectes, je sais ce que c'est et je les pourchasse. Mais on n'a pas le droit de dire que Diwan est une secte."
- "On me demande de retirer mes propos. Je ne le ferai pas, puisque je ne l'ai jamais dit."
- "Pour autant, je ne suis pas d'accord avec l'enseignement par immersion, même pour le breton, l'anglais, l'allemand… Il faut donner à nos enfants l'ouverture, l'épanouissement, la liberté. Bien sûr qu'il faut apprendre et parler plusieurs langues. Moi-même j'en parle trois. Il ne faut pas enfermer. Ne pas créer de fossé, au risque qu'on ne se parle plus ensemble."
- "Nous croyons en l'être humain. C'est pour cela que nous disons : l'humain d'abord. C'est ça, aujourd'hui, être anticapitaliste." (Applaudissements).
Le Parti de Gauche en Bretagne et à Montpellier le Front de Gauche ont déjà débattu de la question des langues régionales. Nul doute qu'après les déclarations de Jean-Luc Mélenchon à Brest, on en débattra encore dans les assemblées citoyennes qui sont annoncées un peu partout. Ou même à l’extérieur du Front de Gauche, comme en témoigne la réaction des Alternatifs jusqu’en Loire-Atlantique.