Les minorités isolées en Amérique du Nord
Deux journées d'études vont avoir lieu à l'université de Clermont-Ferrand sur le thème des résistances culturelles et des formes de résiliences ethno-spatiales, jeudi 7 et vendredi 8 juin. Les participants vont s'intéresser plus particulièrement aux minorités isolées en Amérique du Nord.
Aux yeux des organisateurs, A. Garrait-Bourrier et F. Chignier-Riboulon, les minorités isolées, concept réinterrogé, s’entendent comme des groupes ultra-minoritaires vivant à proximité immédiate, ou au sein d’un groupe dominant et tentant de maintenir, ou de retrouver, leur spécificité, tout en étant au moins biculturels. Il conviendra en premier lieu de définir l'"ultra-minoritaire" en cernant au moins 3 critères qui permettront de le circonscrire :
- la notion de microterritoire
- la notion de microlangue
- la notion de microculture.
Le groupe cumulant les trois critères peut être dit de fait "minorité isolée". À l’inverse et pour cadrer le champ d'analyse, une "minorité" ne répondant pas à l'un de ces critères - vivant par exemple en état d'assimilation sur le territoire "macro" - la ville et non la réserve, pour certaines "familles" indiennes aux USA ou au Canada - pourrait sortir de ce champ d'exploration, car elle ne se trouve plus dans les conditions qui amènent au processus de "résilience" – résistance vitale - et de lutte permanente pour la survie.
Une douzaine d'interventions sont prévues par des universitaires canadiens (du Manitoba, des universités Saint-Boniface, Sainte-Anne), belge (Bruxelles) et français (Rennes, Paris, Aix-Marseille, Lille, Clermont-Ferrand). Les communications annoncées vont traiter de sujets très variés, tels que
- L'autonomie culturelle en contexte francophone minoritaire canadien : le cas de l'Acadie en Nouvelle-Ecosse
- Les minorités involontaires au Manitoba français
- Les protestants francophones du Québec
- La diaspora acadienne du Québec
- Intégration et persistance culturelle chez les Séminoles de Floride
- La danse comme moyen de perpétuer la culture amérindienne…
En Bretagne : la langue comme enjeu
Les organisateurs ont souhaité entendre un point de vue comparatif sur la Bretagne. Je vais donc présenter au cours de ces journées un exposé sur la Bretagne et la langue bretonne comme enjeu.
La question est de savoir si la Bretagne peut-elle être considérée comme une "minorité isolée." Sa situation s'apparente-t-elle ou non à celle des minorités caractérisées comme telles en Amérique du Nord ? Une première approche se doit de l'analyser au regard des trois notions définitoires qui en sont proposées : microterritoire, microlangue et microculture. Si l'on choisit de privilégier le critère de la langue, la situation du breton se caractérise par une assez grande complexité dont les éléments constitutifs doivent être repérés au regard notamment de la géographie, de la linguistique, de la sociolinguistique et de l'histoire.
La pratique de la langue ne correspond évidemment pas à une réalité sociale figée : le nombre de locuteurs ayant diminué de 85 % en deux générations, le breton est devenu minoritaire sur son propre territoire au cours de la seconde moitié du XXe siècle, au moment même où la Bretagne connaissait la plus importante transformation économique et sociale de son histoire.
Pour comprendre les évolutions qui se sont produites et les dynamiques qui sont à l'œuvre, il est dès lors nécessaire de faire appel à la diachronie. Mais aussi à la prospective : peut-on, dans le cas du breton, réunir les conditions qu'énonçait Joshua Fishman dès 1991 dans "Reversing language shift" pour parvenir à inverser la situation sociolinguistique d'une langue que l'UNESCO classe comme étant "sérieusement en danger" ? Le développement de l'enseignement du breton et en breton est-il la réponse aux enjeux du moment ?
Ces journées vont se dérouler à la Maison des sciences de l'homme de Clermont-Ferrand, 4, rue Ledru, amphi 219. L'entrée est libre.
Site internet : www.univ-bpclermont.fr/ceramac