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Le blog "langue-bretonne.org"
4 février 2025

Le père Joseph Irien est décédé. Il animait le centre bretonnant Minihi Levenez à Tréflévénez

Mis à jour : 04/02/2025  22:03

Il était connu de tous comme Job an Irien. Originaire de Bodilis, où il était né en 1937, il est ordonné prêtre en 1962. Il exerce d’abord à Pont-Croix. Le breton étant sa première langue, il fait participer les jeunes de sa paroisse aux concours de chant et de récitation du Bleun-Brug. Il est en 1978 l’un de ceux qui, avec Gérard Pigeon et Jean-Pierre Thomin, vont lancer « Les Cahiers du Bleun-Brug » et donner un coup de jeune à cette vieille association catholique : la revue cessera cependant de paraître dix ans plus tard.

Job an Irien à son bureau en 2015. Photo : FB

Avec Mikael Skouarneg [Michel Scouarnec], un autre prêtre bretonnant, ils renouvellent le répertoire des cantiques dans l’évêché de Quimper et de Léon. Il est ensuite affecté comme aumônier au lycée de l’Harteloire à Brest.

En 1984, Mgr Barbu, l’évêque de Quimper et du Léon, le charge de créer un centre spirituel

L'objectif qui lui est assigné est de favoriser l'expression de la foi et de la prière en langue bretonne et de proposer à tous ceux qui le désirent les éléments d'une vie chrétienne en breton dans l’esprit du concile Vatican II (1962-1965) : ce sera Minihi Levenez [Le monastère de la joie], dans le bourg de la petite commune de Tréflévénez, et ce sera en même temps l’intitulé d’une publication bilingue et d’une maison d’édition.

Job an Irien en sera l’animateur principal le restant de sa vie, entouré d’une petite équipe. Il devient par la même occasion auteur prolifique, tant de langue française que de langue bretonne. Il était bien conscient que toutes les revues d’inspiration chrétienne comme Feiz ha Breiz [Foi er Bretagne] et Bleun-Brug [Fleur de bruyère] avaient depuis longtemps disparu.

Il maîtrisait le breton comme peu le font

« N’eus ken nemedom… » [Il n’y a plus que nous…], me disait-il en 2015. Il était le principal rédacteur en breton de la revue et se chargeait de traduire en français les textes bretons et… en breton ceux en français. Il maîtrisait le breton comme peu le font, à l’oral comme à l’écrit. Il reconnaissait que sur des sujets spécifiques, le registre dans lequel il s’exprimait n’était pas le breton de la vie quotidienne, mais il parvenait à se faire comprendre sans faire appel à quantité de néologismes.

Il touchait un lectorat de 450 personnes – ce que ne font pas toutes les revues en breton - principalement dans le Finistère, mais aussi au-delà. Il publiait par ailleurs des chroniques bilingues dans Le Courrier du Léon, dont la version bretonne paraissait également dans l’hebdomadaire Ya !

Il n’a pas été seulement un auteur, il a été un véritable écrivain. Il a notamment composé la cantate « Ar marh dall » [Le cheval aveugle], mise en musique par René Abjean et qui a connu un grand succès à sa création en 1979. Quarante plus tard le musicien et éditeur Arno Elegoet en a proposé une nouvelle interprétation en 2019.

 

Et il a été un véritable éditeur, et pas que de sa revue. C’est en effet en 1997 que Minihi Levenez faisait paraître « Leor an overenn hag ar zakakramanchou » [Le missel], dont l’édition était présentée par l’évêque, Mgr Guillon. Lequel estimait « opportun que le missel préparé pour le diocèse de Quimper er Léon soit publié à titre provisoire. » Comme le Saint-Siège a pour règle de n’approuver qu’un seul texte pour une langue donnée, il fallait attendre que les trois évêques concernés par la liturgie en langue bretonne lui adressent une demande commune. Mgr Guillon précisait en outre que ces textes avaient été préparés depuis longtemps déjà le P. Job an Irien et une équipe de collaborateurs.

En 2002, Minihi Levenez récidive en publiant « An Testamant Nevez », le Nouveau Testament, dans une traduction effectuée depuis le grec par Pierre Guichou, sous la forme d’un beau livre illustré de photos en couleur ou en noir et blanc de calvaires et de tableaux et couverture reliée.

Job an Irien avait acquis une très forte notoriété tant dans le monde bretonnant que dans la communauté catholique. Dans l’une comme dans l’autre, il aura joué un rôle unique. C’était un grand humaniste. Il laissera le souvenir d’un homme de cœur et engagé.


Ses obsèques seront célébrées en l’église Saint-Houardon de Landerneau, mercredi 5 février à 14h30.

Commentaires
D
C'était un homme de paix. Je l'ai connu au début des années 80 via mon ami l'abbé Yves-Pascal Castel (97 ans cette année !) et lorsque j'ai lancé, avec le regretté Gwenaël Le Duc les fondations du CIRDOMOC à l'abbaye de Landévennec. Du reste, il avait participé au colloque du 15e centenaire de l'abbaye cornouaillaise en 1985. Je me souviens encore, comme si c'était hier, d'avoir travaillé avec lui sur les ruines l'abbaye à cette époque.
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Le blog "langue-bretonne.org"
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Votre blog est impressionnant autant sur le fond que sur la forme. Chapeau bas !
Un correspondant occitan, février 2020.

Trugarez deoc'h evit ho plog dedennus-kaer. [Merci pour votre blog fort intéressant].
Studier e Roazhon ha kelenner brezhoneg ivez. Miz gouere 2020. [Étudiant à Rennes et enseignant de breton. Juillet 2020].

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