Yves Buannic est décédé
Un homme au parcours fraternel vient de nous quitter. Cet homme, c’est Yves Buannic. Un vrai Breton, et un vrai bretonnant. Il est né à Penmarc’h en 1928, dans une famille de huit enfants. Pupille de la Nation, il intègre l’école des Mousses à Saint-Mandrier à l’âge de 14 ans. Il se retrouve en Indochine en 1945 et c’est là que naît sa vocation religieuse. Il quitte la Marine au bout de quinze ans, travaille comme ouvrier du bâtiment, part découvrir la misère autour du monde, avant d’être ordonné prêtre à Paris à l’âge de 43 ans.
Est-ce en raison de "sa vocation retardée" ? Yves Buannic ne sera jamais un prêtre comme les autres et ne s'est surtout jamais enfermé dans une sacristie ni dans un presbytère. Son affectation à la paroisse Notre-Dame du Bon Voyage à Nice, après des Gitans et des Capverdiens, symbolise bien sa démarche.
Les enfants du monde
En 1986, il fonde l'association "Enfants du Monde – Droits de l'homme". Il mobilise des personnalités de tous les milieux (Gilles Perrault, le Dr Cabrol, Yves Duteil, René Vautier…) au service de la paix et des enfants miséreux de la planète. Pour qu'ils ne soient plus des enfants de la rue, il intervient en Haïti, au Vietnam et au Cambodge, au Brésil, en Irak, à Cuba… Il sensibilise F. Mitterrand, puis J. Chirac, sur cet objectif. Il fréquente le Père Aristide avant qu'il ne devienne président de Haïti et Yasser Arafat.
Le père Buannic, pendant des années, s'est démultiplié. Il a même trouvé le moyen de faire venir des gamins de Bagdad jouer au foot en Bretagne. Il s'est investi en faveur de l'Amérique latine, de la Palestine, contre l'apartheid. Il tenait aussi à rendre visite aux Bretons d'Ile-de-France. Il a été, c'est sûr, un prêtre hors du commun.
Il avait le sourire aux lèvres pour vous accueillir et le visage sombre pour dénoncer les injustices dont il avait été le témoin. Grand fumeur devant l'Éternel, il s'exprimait d'une voix rauque. Il partageait son temps entre Nice et Paris et venait quand il le pouvait passer quelques jours à Penmarc'h, dans un ancien wagon qu'il avait modestement installé sur une toute petite parcelle, pas très loin de la chapelle de la Madeleine dont il se plaisait à répéter que les vitraux en avaient été refaits par Bazaine.
C'est là que j'ai pu l'interviewer plusieurs fois en breton. Une fois aussi à Paris, avec la complicité d'Anna Quéré, en mai 2000, pour le magazine Red an amzer, sur France 3. Il s'exprimait très bien en breton, avec la conviction qui le caractérisait. Yves Buannic a été un homme de Bretagne comme on n'en croisera plus.
Lire le portrait qu'en fait Marine Lucas sur le site : http://altermondes.org/
L'autobiographie d'Ybes Buannic, L'enfant du large" est parue en 2007 aux Presses de la Renaissance, avec une préface de Guy Bedos.